À propos de l’actualité américaine

Rapport au Congrès : position du comité de pilotage du COBEPS1

Contexte

Le phénomène OVNI (UFO en anglais) a été régulièrement présent dans l’actualité américaine depuis 1947 et a fait l’objet de plusieurs études par l’US Air Force (projects Sign, Grudge, Blue Book). La conclusion de l’armée a été que ce n’était un problème de sécurité que dans la mesure où les vagues de signalements ovnis risquaient de submerger les canaux de communication de l’armée et qu’il fallait les limiter, donc discréditer le sujet. Pour l’aspect “scientifique” l’armée a commandité un certain nombre de recherches auprès de l’Institut Privé Battelle, puis a confié au physicien Richard Condon (Université du Colorado) le soin de décider si le phénomène avait un intérêt scientifique. En 1969, la commission Condon concluait par la négative. Ici s’achève théoriquement l’implication officielle des USA dans ce dossier.

Depuis, les signalements continuant, la question est toujours restée présente dans l’actualité et il était de bon ton, à chaque élection présidentielle, d’interroger les candidats, puis les présidents à ce propos. Bien que Carter ait été témoin ou malgré la présence de John Podesta (pro-divulgation) comme chef de Cabinet de Clinton, le sujet n’a plus jamais été traité officiellement. Toutefois les différents services de renseignement y ont toujours été attentifs, utilisant même à l’occasion le phénomène pour couvrir des essais de nouveaux appareils. Il y a eu aussi des sollicitations de diverses organisations en faveur de l’ouverture des dossiers de l’armée et de l’Etat (Disclosure) et à cela sont venus s’ajouter des pressions par rapport au crash de Roswell et divers rapports officiels à ce propos.

Puis il y eut des vagues d’observations plus importantes, comme la vague belge de 1989 à 1991. De nombreux témoins se sont manifestés sur une courte période, et parmi eux des militaires, des policiers, des scientifiques… Le phénomène devenait plus crédible, même l’armée tenta d’intervenir, et des pilotes acceptaient enfin de témoigner, après des courses-poursuites derrière des échos radar énigmatiques comme cette nuit du 30 au 31 mars 1990 au-dessus du centre de la Belgique. Cette vague a marqué un tournant en ufologie, en offrant des indices très tangibles de la présence d’engins au comportement potentiellement intelligent, inexplicable et inexpliqué encore à ce jour. L’ufologie n’était plus un hobby honteux ou farfelu, car ces indices pouvaient permettre un début d’étude suivant la mise en place d’une méthodologie détachée de l’aspect passionnel.

En 2017 « To The Stars Academy » (TTSA) est créé, il s’agit d’une organisation privée US qui est composée de personnalités du spectacle, des médias, de l’industrie et d’un ancien membre d’un service de renseignement. Son but est soi-disant de faire de la science avec les UAP (Unidentified Aerial Phenomenon – équivalent de PAN) et de révéler que le Pentagone dispose de preuves de l’existence d’UAP ainsi que d’une équipe, et a financé des travaux de recherche durant les dernières années. TTSA révèle des images, celles du porte-avions Nimitz (qui étaient par ailleurs connues depuis 2007) et d’autres images sont encore divulguées. Manifestement, comme beaucoup d’organisations américaines, le moyen utilisé est celui de faire beaucoup de bruit médiatique afin de faire bouger les positions de l’Etat. Il est exact que les plus hautes autorités militaires de la plus grande puissance mondiale ont validé ces images. Petit à petit, la présence attestée de ces phénomènes de ces phénomènes autour des dispositifs d’armements nucléaires, et qui suivent parfois les manœuvres de l’armée américaine et son équipement de pointe dans les océans est officiellement reconnue. Radaristes et pilotes sont autorisés à témoigner des capacités incroyables d’engins inconnus, dépassant de très loin des possibilités techniques contemporaines. Ils sont même sollicités pour témoigner via un nouveau formulaire et la circulaire Janap 1462, les contraignant à se taire, est partiellement levée. La machine s’emballe, progressivement la pression s’accentue et le Congrès demande un rapport aux services de renseignement. Celui-ci doit être publié avant le 20 juin 2021. Cette situation est susceptible d’amener des développements intéressants pour l’ufologie mondiale.

Position du COBEPS

Ces documentaires ont été réalisés en sous-traitance par une société londonienne, Pioneer Productions, qui m’avait contacté début 2012 pour avoir accès aux archives de la SOBEPS, en particulier aux documents relatifs au 29 novembre 1989, à des informations concernant la photo de Petit-Rechain et à l’affaire des F16. Bref : aux désormais “classiques” de la vague belge. Dans un premier temps, j’ai répondu que je ne souhaitais plus participer à ce genre de projet car cela avait déjà été amplement traité, et trop rarement de manière satisfaisante. Comme à l’accoutumée, ils ont alors insisté en expliquant que leur démarche, contrairement à celle de tous les autres (National Geographic oblige !), était différente, plus rigoureuse et soucieuse du respect des faits... Rapidement, cependant, j’ai compris qu’ils ne connaissaient strictement rien au sujet (une fois de plus !) et qu’ils suivraient le même canevas déjà maintes fois répété par d’autres équipes. J’ai donc demandé qu’ils m’envoient un script, afin d’en savoir plus sur leurs intentions exactes. D’emblée, il me fut répondu que ce n’était pas possible. En conséquence, j’ai décliné leur requête.

Héritier de la SOBEPS, nous sommes curieux, potentiellement enthousiastes et nous restons attentifs mais conservons une distance critique tenant compte de ces répétitions de fièvres aux USA, fièvres qui enflamment les imaginations jusqu’à chez nous. Nous attendons le rapport mais pensons qu’il ne contiendra rien de bien précis à ce stade, car ce n’est pas en quelques mois (demande datant de la fin du mandat de Trump) qu’il sera possible de le développer suffisamment. D’autre part, il reste nécessaire pour la sécurité des USA de ne pas divulguer en même temps des informations Défense Classifiées. De nouvelles images ou de nouveaux cas seront révélés, les données techniques et les détails correspondants ne seront pas vraiment disponibles. Les services de renseignement ne sont pas habilités non plus à formuler des hypothèses publiques sur l’origine de ces phénomènes. Autrement dit, nous sommes prudemment optimistes.

Les ovnis existent et leur étude peut apporter des connaissances nouvelles et utiles, nous en sommes persuadés. La reconnaissance officielle de l’existence d’UAP est effective à peu près partout dans le monde bien qu’elle n’ait pas poussé les autorités à prendre en charge cette question de manière publique et transparente ; à part en France (GEIPAN/CNES), ou au Chili. Ces autorités ont donc préféré laisser ce champ à des organisations privées, éventuellement en appuyant ponctuellement leurs actions, comme lors de la vague belge (1989-1991), mais sans jamais les renforcer structurellement. Le monde scientifique et universitaire s’est toujours tenu à distance du phénomène même si des scientifiques ont pu s’y intéresser, mais hors du cadre de la recherche officielle. Il est temps, grâce à ce nouvel élan, d’insister pour que l’on investisse collectivement dans la recherche ufologique. C’est un challenge particulièrement motivant.

La toute grande majorité des signalements actuels en Belgique trouvent une explication (plus ou moins certaine). Cependant, la complexité de certaines manifestations, notamment dans les interactions avec les témoins et l’environnement, suggère la manifestation d’une intelligence. À partir de là, il est facile et tentant d’imaginer que cette intelligence est extérieure à l’humanité et à la planète ; d’où l’intérêt marqué par beaucoup pour l’hypothèse extra-terrestre. Cette hypothèse n’est pas falsifiable en l’état actuel des choses : on ne peut pas prouver qu’elle n’est pas vraie à moins de réduire tous les cas non-expliqués à des explications conventionnelles. Il n’y a pas non plus, à notre connaissance, de preuve directe indiscutable. Encore faudrait-il se mettre d’accord sur cette/ces preuves absolues (la composition isotopique de matériaux éventuellement récupérés, n’étant pas non plus à 100 % indiscutable). Les preuves sont essentiellement “testimoniales” (du même type que celles qu’on rencontre dans les sciences humaines). Nous sommes également incapables de prévoir pour le moment l’occurrence des manifestations ovnis et encore moins de les reproduire. Toutefois, l’hypothèse extra-terrestre est de plus en plus plausible dans la mesure où les astronomes découvrent régulièrement de nouvelles exoplanètes, qu’une part de celles-ci sont rocheuses et situées dans la zone “habitable” de leurs étoiles. Ceci permet d’envisager qu’une proportion de celles-ci ont la possibilité d’abriter la vie. Rien ne permet toutefois d’affirmer que ces planètes abritent des civilisations et que celles-ci soient capables de venir nous visiter.

Depuis 2015, le COBEPS et d’autres organisations ufologiques belges dont Belgisch UFO Meldpunt ont reçu quelque 200 à 300 signalements annuels et très peu restent non identifiés. L’essentiel de ces signalements correspond d’ailleurs à des phénomènes qui sont très simples dans leurs manifestations : objets ou lumières en mouvements cohérents, isolés ou en groupe, souvent de très petites dimensions apparentes. Il y a très peu d’observations rapprochées, d’interactions avec l’environnement (effets physiques). Il reste au maximum 5 %3 de cas non expliqués qui sont la manifestation d’un ou de plusieurs phénomènes encore inconnus à ce jour. Nous continuons à documenter et à affiner nos méthodes d’investigation et d’analyser des ensembles de cas afin d’en tirer d’éventuelles structures répétitives ou explicatives.

Nous devons veiller à ce que l’enthousiasme de ces nouvelles révélations ne crée pas un emballement médiatique énergivore et chronophage. D’autre part, il convient d’attendre le contenu du rapport en question. D’où cet avis qui résume la position actuelle des membres du comité de pilotage du COBEPS.

Le comité de pilotage le 12/06/2021


  1. Le COBEPS est une association de fait ; chaque personne y est libre d’avoir ses idées et pensées par rapport au phénomène OVNI. Cette position a seulement été discutée et concertée en groupe de pilotage. Elle ne reflète que le compromis entre les membres de ce groupe (8 personnes).
  2. Janap 146 : consulter Janap_146.pdf
  3. Le rapport Condon retient 3 non-identifiés sur 90 cas examinés en détail soit 3,33 %. Le GEIPAN compte 3,4 % de non-identifiés (PAN D).