Puisque nous fermons boutique, et juste avant de descendre le volet, je m’en voudrais de prendre congé sans vous conseiller un peu de lecture… « pour la route », comme on dit ! Les ouvrages sur les ovnis sont légion et le meilleur y côtoie le pire. Ceux dont il sera question ici sont parus dans le courant de l’année et ils méritent toute votre attention.
On nous demande souvent notre avis à propos de cette désormais incontournable affaire de Roswell, à coup sûr l’événement ufologique (ou le non-événement, selon d’autres !) qui a fait couler le plus d’encre. Pierre Lagrange y avait déjà consacré un volume (« La rumeur de Roswell », La Découverte, 1996), ainsi que Gildas Bourdais (« Sont-ils déjà là ? », Presses du Châtelet, 1995, et « Roswell : Enquêtes, Secret et Désinformation », éditions JMG, 2004). Pour faire court, disons que le premier est plutôt « contre » l’originalité de l’affaire, tandis que le second est franchement « pour ». Il faut le concéder : y voir clair dans l’inextricable écheveau de Roswell n’est pas une entreprise aisée. L’auteur américain Karl Plock – dans un premier temps favorable à l’authenticité des faits qu’on nous présente – a mené une contre-enquête longue et méticuleuse auprès des principaux protagonistes et nombreux enquêteurs, civils et militaires, qui s’y sont frottés depuis pas mal d’années maintenant. Elle l’a conduit à reconsidérer son jugement (il était « pour » dans un premier temps !) et il nous a livré les résultats de ses investigations dans cette somme parue en 2001 aux États-Unis, enfin disponible en français. Pflock, qui est décédé en 2006, a été conseiller technique pour le Département de la Défense, consultant au sein des milieux politiques à Washington, et employé de la CIA. Ayant joué un rôle important dans la relance de l’enquête sur Roswell par le Congrès et étant considéré comme l’un des meilleurs spécialistes sur les ovnis, il était le mieux placé pour reprendre l’affaire par le commencement et se pencher sur les multiples rebondissements qui la parsèment. Au terme de cette lecture, et au bout du bout du compte, on ne peut s’empêcher de constater que l’affaire de Roswell compte une belle bande de fieffés menteurs ou d’affabulateurs et qu’il est évident que les médias et certains ufologues ont considérablement gonflé l’importance des témoignages ainsi que leur nombre. En outre, comme je l’ai déjà écrit, il ne faut pas perdre de vue que Roswell est aussi « une bonne affaire » pour plus d’un ! Si le sujet vous intéresse donc tout particulièrement et bien que Gildas Bourdais conteste les conclusions de Karl Pflock dans son dernier livre sus mentionné, je ne puis que vous inciter à lire ces derniers ouvrages sur Roswell, pour vous forger votre propre opinion.
Ce livre est la réédition du texte paru en 1978. Mais l’auteur a tenu à revenir sur son parcours dans une préface inédite où il examine sans concessions les qualités et les défauts de son ancienne enquête et, en s’appuyant sur sa propre démarche, il s’efforce d’imaginer les voies de l’ufologie future. Quelle bonne idée d’avoir sorti cette version avantageusement augmentée d’un livre dont Michel Bougard vous avait déjà dit tout le bien qu’il en pensait dans Inforespace n° 42, lors de sa parution en 1978 : « Je dois l’avouer : autant l’ouvrage de M. Monnerie avait pu m’irriter par certains aspects tronqués, autant celui de B. Méheust m’a enthousiasmé par sa rigueur et son originalité. Pendant 350 pages, Méheust étonne, révèle, montre, démontre, inquiète, foisonne d’idées lucides et s’empêtre dans des arguments philosophiques, utilise une écriture limpide ou s’enferme dans un jargon illisible. Ouvrage déroutant, révélateur et irritant. Ouvrage qui ne peut en tout cas laisser indifférent au même titre que celui de Monnerie. Ouvrage capital sans doute. […] C’est en tout cas un livre que vous devez vous procurer sans tarder. Non seulement parce qu’il est essentiel dans la bibliothèque de celui qui veut se tenir au courant de l’évolution des idées en ufologie, mais surtout parce qu’il s’agit là d’un travail essentiellement original. Cet ouvrage déchaînera les passions : porté aux nues par certains, Méheust sera sans doute traîné dans la boue par d’autres. Mais qu’importe, le plus important est qu’il ne peut pas vous laisser indifférent ». Et tout comme lui, je persiste et signe. Voilà probablement un des livres les plus pertinents qu’on ait jamais écrit sur le phénomène ovni, qui en même temps déborde largement sur une réflexion hautement passionnante et fascinante, débouchant sur un problème chargé d’implications philosophiques et scientifiques qui ne peut que nous interpeller. Pour avoir minutieusement consulté nos volumineux rapports d’enquêtes, Méheust est aussi un bon connaisseur des événements qui se sont déroulés dans notre pays entre 1989 et 1991. Il avait d’ailleurs écrit ce qu’il en pensait dans un petit opuscule : « Retour sur l’“Anomalie belge” » (le Livre Bleu Éditeur, 2000). Avec Méheust, et à l’heure de dissoudre notre association, nous affirmons haut et fort que les explications données ci et là pour rendre compte des observations remarquables qu’on nous a rapportées ne sont pas satisfaisantes. La « vague belge » demeure inexpliquée. Enfin, le livre est agrémenté d’une époustouflante iconographie montrant de superbes soucoupes volantes issues de magazines américains datant d’une époque… antérieure à la célèbre observation de Kenneth Arnold (juin 1947), soit donc bien avant que le terme ne fut même forgé ! Et comme le soulignent les éditeurs : « Certaines des “soucoupes” imaginées par des illustrateurs de pulps des années trente sont tellement proches des représentations auxquelles nous ont habitués les magazines depuis 1947, qu’on a peine à croire qu’elles ont été conçues sans référence aux ovnis ». Je vous le répète : un livre à lire de toute urgence !
« Nous cache-t-on la vérité sur les ovnis ? Depuis quelques années, l’existence d’un complot pour étouffer la vérité, jusque-là confinée aux milieux ufologiques, est admise par des scientifiques et par certains militaires. Mais quelle vérité ? Pierre Lagrange, l’un des rares chercheurs à avoir analysé en détail les documents déclassifiés issus des archives militaires américaines et françaises, décrit la montée de la théorie du complot et étudie les arguments avancés pour la défendre. Il montre comment certains experts militaires français, dénonciateurs des prétendus complots de l’US Air Force, reprennent en fait la même démarche, jugeant le grand public trop immature pour être associé au débat et connaître la vérité sur les phénomènes ovni. Pierre Lagrange met en lumière les liens qui unissent théoriciens du complot et “debunkers” et soumet à l’examen scientifique des documents jusqu’ici classés top secret, présentés pour la première fois en français ».
Voilà ce que nous dit la quatrième de couverture de cet ouvrage que le temps nous a manqué pour lire avec toute l’attention qu’il mérite, au moment de mettre notre dernier numéro sous presse. Il nous semble cependant tomber à pic tandis qu’il est à nouveau beaucoup question du sujet dans les médias et sur internet, où l’on trouve tout et son contraire et où les thèses « conspirationnistes » abondent.